Pour Rueil HIP HIP HIP !
Hourra !
Pourquoi tant de joie ?
Tout simplement parce que mon équipe a remporté la ligue de Nationale IV dans laquelle notre objectif clair était la montée.
Contrat sur l'année pleinement réussi, on finit invaincus et net vainqueurs. Tout le monde est content, les joueurs et le bureau du club ont fêté ça au restau dimanche soir, accompagnés de nos "pros" de Nationale II.
Ceux-ci ont été moins chanceux et ratent la montée en Nationale I d'un cheveu, en s'inclinant 3 à 2 contre Lutèce, notre grande rivale cette saison. Tanpis ! L'essentiel est de se maintenir, et je dois dire que j'ai une grande confiance pour l'année prochaine : je crois que notre équipe est maintenant soudée et compte d'excellents joueurs, comme Guillaume (pas moi donc, un autre plus costaud :o) ) qui réalise d'ailleurs une perf' assez, que dis-je, tout-à-fait remarquable : 7,5 sur 10 contre une opposition très forte (dans les 2250 si je ne m'abuse).
- une centaine de membres
- 45 jeunes
- des équipes en Nationale 6, 5, 4, 3 et 2
- des qualifications pour les phases finales dans quasiment toutes les compétitions
Le Club de Rueil va bien !
Quant à moi, j'ai rempli mon contrat perso en gagnant ma partie avec les noirs, contre Paul Tarchichi, un jeune libanais vraiment gentil avec qui j'ai eu plaisir à jouer et analyser.
J'ai préparé un fichier .pgn pour diffuser ma partie et les commentaires, mais je n'ai encore pu l'uploader sur mon site. En attendant, la voici.
Lestrelin G - Tarchichi P
Levallois 2006
Me voilà donc avec la difficile tâche de jouer cet important match avec les noirs. L'objectif pour l'équipe ? Un simple match nul sera suffisant pour assurer la montée, compte tenu de nos résultats antérieurs, tandis que nos adversaires du jour, deuxième juste derrière nous au classement général, se doivent de gagner pour s'adjuger la première place du groupe et s'emparer de la qualif' pour la Nationale III.
Donc, nos sommes sensés jouer solide et laisser nos adversaires prendre les risques, a fortiori pour nos joueurs avec les noirs, un match nul sera tout-à-fait satisfaisant...
Voilà bien ma veine, moi qui ait l'habitude de jouer des systèmes à double tranchant avec les noirs, toujours risqués...
Après réflexion et discussion avec mon capitaine, je décide de jouer "mon jeu" sans essayer d'aller contre ma nature (plutôt casse-cou)...
La partie commença donc ainsi
1.e4 c5
2.Cf3 d6
3.d4 cxd4
4.Cxd4 Cf6
5.Cc3 g6
Le Dragon sort de son antre !
6.Fe2
Encore une fois (c'est la troisième en trois parties), mon adversaire évite la ligne principale, quand donc pourrais-je jouer une pure Rauzer ?
6...Fg7
7.Fe3 0-0 (diagramme)
8.g4
Je m'attendais plus à un plan à base de 0-0, f4 etc, loin des variantes agressives que j'affectionne...
8...Cc6
9.g5 !?
Un plan très original, plus naturel était 9.f3 qui transposait dans des variantes classiques. Maintenant l'échiquier s'enflamme.
9...Cg4
Un bon coup simplificateur qui donne l'initiative aux noirs.
10.Fxg4
10.Cxc6 Cxe3 11.Cxe7+ Dxe7 12.fxe3 est horrible.
10...Fxg4
11.Dxg4
11.Cxc6 n'est pas satisfaisant : 11...Fxe1 12.Cxd8 Ff3! et les blancs pleurent.
11...Cxd4
12.0-0-0 Cc6
Forcé et bon : le cavalier c6 tient toute la position ! Il empêche Fd4 (les blancs ont intérêt à échanger le fou du dragon et le pion en g5 empêche à terme toute manoeuvre à base de Fh6, la solution ne pourra venir que du centre, mais le cavalier c6 ferme aussi cette porte !) tout en défendant e7, et prépare un saut en b4 ou e5.
13.h4
L'attaque des roques opposés commence, mais les noirs sont bien préparés.
13...Da5
14.h5 Tfc8 !
Un coup classique dans la dragon, qui offre de nouvelles munitions à l'attaque sur le roque blanc (on voit se profiler l'incontournable sacrifice de qualité en c3) tout en libérant la case f8 pour le roi... Je me souviens d'un des premiers principes généraux qu'on m'ait appris aux échecs : " toujours essayer de jouer des coups remplissant plusieurs fonctions ".
15.Fd2 ?
Un essai malheureux, dans une position encore défendable. La meilleure ligne semble être 15.hxg6 hxg6 16.Dh3 avec l'idée de contrer 16...Ce5 par 17.Fd4.
15...Cb4 ?!
J'ai estimé à tort que ce bond était aussi puissant que l'autre, mais il n'en est rien. 15...Ce5 gagnait tout de suite : 15...Ce5 16.Dh3 Cc4 avec la menace totalement imparable 17...Cxb2.
16.hxg6 hxg6
17.Dh3 (diagramme)
Ici je réfléchis longtemps, ayant beaucoup d'avance à la pendule, pour trouver un gain net. J'ai regardé plusieurs idées mais aucune ne me satisfaisait complètement.
17...Cxa2+ 18.Cxa2 Dxa2 19.Fc3 Txc3 n'est pas terrible, mais 17...Txc3 18.Fxc3 Cxa2+ 19.Rd2 Cxc3 20.bxc3 Dxg5 donne un léger avantage noir (19...Tc8 n'est pas possible car la dame blanche regarde c8).
Tout d'un coup, une combinaison des plus séduisantes m'apparut, en même temps qu'un sourire béant coupait mon visage en deux. Imaginant déjà les applaudissements et la fascination que la partie ne manquerait pas d'opérer sur les autres joueurs, je jouais a tempo ...
17...Dxa2 ?!?!!??
Booooom ! Que n'étais-je pas fier de moi, excité et impatient de voir la mine déconfite de mon adversaire, après ce coup terrible. Dans la seconde ou je finis de noter le coup, j'ai vu ce qui allait ce passer, le grain de sable dans l'engrenage, la plume sur la balance qui changeait tout...
Après quelques minutes d'incertitude, pendant lesquelles j'ai prié pour que Paul abandonne sur le champs, je tremblais intérieurement, sans cesser de me répéter "IMBECILE, TU LE SAIS POURTANT, QU'ON NE JOUE JAMAIS DE COUP SI VIOLENT SANS VERIFIER, PATZER QUE TU ES".
18.Dh7+ Rf8
19.Dxg7+
"This came as a lightning from a clear sky" aurait dit mon idole échiquéenne, le grand Alexeï Shirov.
19.Cxa2 Txc2+ 20.Rb1 Txb2+ 21.Ra1 Cc2 mat.
19...Rxg7
Sans le fou, la combinaison précédente ne marche plus, à mon grand damne.
20.Cxa2 Cd3+
21.Rb1 Cxf2
22.The1 Cxd1
22.Txd1
Je suis au moins toujours en vie, avec un grand avantage de temps sur mister Tarchichi, à qui il reste moins de 10 minutes pour atteindre le 40ème coup.
22...Tc4
23.Txd6 Txe4
24.Td7
Je ne donnerai que de brefs commentaires sur cette fin de partie, difficile pour moi, mais qu'une bourde de mon adversaire a finalement simplifier.
24...Te8
25.Cb4 Tg4
26.Txb7 a5
27.Cd3 Txg5
L'espoir commence à renaître. Le zeitnot pèse terriblement sur les blancs.
28.Fxa5 e4
29.Ce1 ??
La gaffe. 29.Fc3+ Rg8 (29...Rh6 30.Cf4 f5 31.Fg7+ Rg5 32.Ch3+ perd la tour) était compliqué.
29...Txa5
30.b4
Et maintenant, je gagne aussi le cavalier !
30...Tg5
31.Rc1 Td8
32.Te7 Tg5
33.Rb2 Rf6
34.Ta7 Td1
C'est complètement fini.
35.b5 Txe1
36.b6 Tgg1
37.Rc3 Tb1
Et Paul abandonna quelques coups plus tard.
0 - 1